Aussi froide que la glace, la roche explose

Rapidement, il s’avança vers la foule, et, après de nombreux détours, rallia le bas d’un chemin en pente conduisant dans les hauteurs de la montagne. La neige épaisse comportait de faibles traces de pas. Des voix se firent entendre alors qu’il approchait de la zone qu’il désirait atteindre.

- Eh vous, qu’est-ce que vous faites là ? dit une voix d’homme.

- Rien qui ne vous concerne, répondit une femme. Allez-vous-en ! Laissez-moi tranquille !

- Je vous ai vu d’en bas, vous m’observiez ! Tellement peu discrètement que j’ai senti votre regard peser sur moi !

- Moi ? Vous observer ? Dans quel but ?! Regardez-vous, qui oserai s’attarder sur un boiteux délabré dans votre genre…

Un bruit de métal fendant l’air se fit entendre.

- Attention à ce que tu dis la maritorne, où je me ferais un plaisir de t’éventrer dans une fontaine de hurlements ! grogna l’homme. Pars d’ici maintenant !

- Bien sûr, pour que vous m’attaquiez par surprise lorsque je redescendrais…Oui, je vais descendre, mais vous allez rester ici un moment…

- Eh ! Ah ! C’est ça, fuit ! Vile femme ! Sorcière !

Les grognements de l’homme n’eurent pas de réponse. Instinctivement, Iziankh s’était caché derrière une excroissance rocheuse. De là, il put observer l’élémentaliste descendre à vive allure vers le campement. Rapidement, il s’engouffra dans le passage d’où la femme était sortie, débouchant sur un petit promontoire, où un homme était penché vers ses jambes qui étaient prises dans de la glace. Entendant le Rôdeur arriver, il tenta de se tourner tout en bougonnant :


- Pourquoi ne pars tu pas ?

Remarquant qu’il n’avait plus affaire à la femme il se redressa :


- Quoi ? Passez votre chemin.

- Oh non, répondit Iziankh. Je vous ai tellement cherché, maintenant que je vous tiens, je ne vais pas faire demi-tour.


Voyant la mine déconcertée du Derviche, Iziankh tira sa cape verte, laissant apparaître aux yeux du Derviche l’arbre brodé d’or.

- Oui, vous avez une belle cape, et alors ? Que me voulez-vous ? Je n’ai rien à vous apporter d’autre que mon insociabilité.


N’ayant pas de temps à perdre, Iziankh alla droit au but.

- Herugaur, vous avez longtemps côtoyé les nains, j’ai besoin que vous m’aidiez à traduire une de leur missive, pouvez-vous m’aider ?


- Non, je ne suis pas un mercenaire qu’on vient chercher quand c’est le dernier recours. Je n’exige rien de vous, alors n’exigez rien de moi.


Empoignant fermement sa faux, il attaqua le bloc de glace qui céda sous l’afflux de coups. Libre de ses mouvements, il s’approcha du Rôdeur, qui reprit :

- Je ne vous demande pas grand-chose, juste lire un parchemin ! C’est extrêmement important !


- Et en quel honneur vous aiderai-je ? Je ne demande pas grand-chose, juste avoir la paix et vivre comme je l’entends. Je n’ai pas eu de contacts avec les Nains depuis…depuis longtemps, et je ne compte pas en avoir d’avantage jusqu’à ma mort ! Laissez-les donc là où ils sont !


- Justement, ce sont eux qui nous veulent du mal, à moi et mes amis, les mêmes Nains qui vous ont infligé cette blessure dans le dos qui vous handicape tant.


- Comment savez-vous ça ? fit le Derviche sur un ton de défi. Personne ne sait quoi que ce soit sur moi, vous en savez autant que les Nains du Sommet sur moi, étrange coïncidence. Partez d’ici, je n’ai plus rien à faire avec les Nains !


Il resserra l’emprise qu’il avait sur sa faux, prêt à frapper.

- Je n’attaquerai pas à votre place, abaissez votre arme…


- Certainement pas ! Vous me prenez pour une buse ?!

- Arrêtez ça, je ne vous veux aucun mal. Vous avez déjà rencontré des Veilleurs des Sylvecîmes, vous savez que nous ne vous voulons aucun mal, sortez vous de votre folie ! Vous êtes à moitié impotent à cause de vos douleurs aux côtes, vous n’arriverez à rien avec des mouvements aussi maladroits. Mes amis guettent ce qu’il se passe ici, et ils ont du remarquer que la femme est redescendue sans moi. Il suffit d’un signe et ils accourront, vous ne pourrez rien contre eux. Allez-vous m’aider ?

- Comment connaissez-vous autant de détails sur mon état de santé ?! mugit le Derviche.

- C’est pourtant simple à comprendre, c’est moi qui vous ai sauvé au Passage de Lornar !

- Vous n’auriez jamais du faire ça ! Regardez ce que vous m’avez infligé !

Il leva un peu plus sa faux. Iziankh n’attendit pas plus, il sortit de son carquois une de ses flèches explosives et tira sur la roche derrière le Derviche. La détonation surprit le Derviche qui s’élança sur Iziankh. Ce dernier lâcha son arc et attrapa le Derviche avant de le projeter vers l’arrière. L’explosion avait déclenché un léger éboulement et il devait en écarter l’homme qu’il ne pouvait laisser mourir. Dans sa chute, il percuta un rocher et s’évanoui.

- Désolé, lâcha Iziankh.

L’explosion avait été le signe le moins discret qu’il ait jamais envoyé aux Veilleurs, il était sûr qu’ils allaient accourir dans quelques minutes. Il attrapa le corps inerte du Derviche et le tira jusqu’au chemin d’où il était arrivé. Ils devraient s’éloigner de l’endroit pour le faire parler, l’explosion allait attirer plus que les Veilleurs…